Réadaptation neurologique, un long combat aux armes multiples

 

La réadaptation neurologique se définit comme un programme d’entraînement destiné à restaurer les fonctions neuromusculaires de patients souffrant de maladies neurodégénératives, ou de blessures au cerveau [1].

Un programme de réadaptation neurologique a toujours pour particularité d’être réalisé sous la supervision du corps médical.

Les cas impliquant la mise en place d’une réadaptation neurologique sont les suivants [2] :

– l’hémiplégie (paralysie d’un côté du corps),

– l’accident vasculaire cérébral (A.V.C.),

– la sclérose en plaque (destruction de la myéline),

– La maladie de Parkinson (maladie neurologique),

– la lésion médullaire (lésion de la moelle épinière suite à un accident),

– le traumatisme crânien (choc entre le cerveau et la boîte crânienne, entraînant des lésions cérébrales),

– le syndrome cérébelleux (affection du cervelet, par maladie ou par accident).

La réadaptation neurologique touche tous les types de patients : du retraité, souffrant d’une maladie pernicieuse, au militaire blessé en mission ou à l’entraînement, jusqu’à l’enfant renversé par une voiture.

Rien que les A.V.C. représentent 25% des décès aux Etats-Unis pour les personnes âgées de moins de 65 ans [3]. C’est dire la prévalence de cette affection dont le chiffre fait ici l’économie de tous les autres cas pouvant mener un individu vers une réadaptation neurologique.

Surtout, la réadaptation neurologique est toujours un processus long et difficile, qui s’apparente au combat le plus rude : celui contre soi-même.

La réadaptation neurologique, un long combat

La réadaptation neurologique se compte en années d’efforts et de persévérance. A la suite d’une blessure, les deux premières années sont les plus importantes pour surmonter le handicap, au moins d’un point de vue psychologique [4].

En ce qui concerne les séquelles ou les conséquences d’une maladie évolutive, chaque affection doit être considérée séparément, notamment de par les types d’exercices mis en place par le corps médical au profit du patient.

Ainsi, sans vouloir dresser une liste exhaustive, le concept Bobath peut être utilisé dans le cadre d’un AVC [5], tandis que la physiologie neurologique pourra s’adresser à des patients souffrant d’autres pathologies (sclérose en plaque, maladie de Parkinson) [6].

Toutefois, quelques soient les programmes de réadaptation mis en place, ces derniers prennent du temps. Ainsi, et bien que chaque cas soit spécifique, le conseil fédéral allemand de réadaptation (B.A.R., Bundesarbeitsgemeinschaft für Rehabilitation), préconise un délai minimum de 8 semaines en phase de réadaptation précoce, appelée phase B.

Sachant qu’il existe sept phases, on comprend d’autant mieux que la réadaptation complète peut être très longue.

Les différentes phases de la réadaptation

Les différentes phases de la réadaptation se distinguent par les lettres de l’alphabet. Ainsi, elles vont de la phase A à la phase G [7] :

– phase A : il concerne l’hospitalisation du patient dans une phase grave de la maladie,

– phase B : c’est la phase de réadaptation dite “précoce”. Le patient ne peut généralement pas encore se mouvoir. Il est parfois même encore inconscient,

– phase C : le patient est toujours très encadré par l’équipe médicale, mais est conscient et participe aux activités de manière volontaire,

– phase D : le patient a fait de grands progrès. Il peut désormais effectuer des tâches quotidiennes en autonomie et peut recommencer à vivre seul, si nécessaire,

– phase E : le patient est réadapté professionnellement, afin de pérenniser les gains des phases A à D,

– phase F : elle concerne les patients qui ne sont pas en état d’être autonome. Ils ont un grand besoin de soin.

– phase G : le patient a besoin d’être assisté dans la réalisation des tâches quotidiennes.

Face au nombre de patients victimes, différents types de thérapies ont été mis en place.

Les thérapies à haute intensité

Le corps médical est parvenu à déterminer que les activités de haute intensité (on parle de “sub-maximale”), permettaient aux patients d’améliorer leur mobilité [8].

Conjuguée avec une personnalisation du protocole de soin, nommé “shaping”, et une participation active du patient, cette méthode a fait ses preuves [9].

Les concepts Bobath, Affolter et Perfetti

Particulièrement utilisés dans le cadre des A.V.C., les concepts Bobath, Affolter et Perfetti ont tous fait leur preuve. Le corps médical s’accorde pour dire qu’aucun n’est supérieur à l’autre [10].

Autant dire que, dans le cadre de l’individualisation des thérapies, le patient peut, avec l’équipe médicale, se diriger vers un protocole de soin qui pourrait mieux lui convenir.

Il faut souligner que les méthodes traditionnelles, certes fonctionnent, mais doivent être mises en place dans des environnements repensés.

Vers une meilleure organisation hospitalière

Les médecins suisses se sont rendus compte que la récupération motrice des patients pouvait être améliorée si une meilleure prise en charge globale leur était proposée [11].

En d’autres termes, le manque de communication entre les nombreux services prenant en charge les patients, peut jouer contre eux. Comme un véhicule, dont l’énergie produite par le moteur se perd dans les frottements des roues, la pression du vent, etc., interdisant le mouvement perpétuel.

Il ne va de même dans l’organisation des services hospitaliers. C’est la raison pour laquelle les médecins du centre hospitalier universitaire du canton de Vaud ont mis en lumière ce phénomène.

Elles ont ainsi préconisé une plus grande communication, et des prises de décision conjointes entre tous les acteurs de la chaîne de soin. Une initiative qui a montré qu’elle faisait du bien aux patients.

Toutefois, la science ne se repose jamais sur ses acquis, et de nouveaux protocoles sont explorés.

De nouvelles techniques de prise en charge

Un patient sur cinq perd encore en motricité dans un délais de trois ans après avoir été victime d’un A.V.C..

L’étude de ces patients a permis de déterminer qu’ils étaient souvent victimes de dépression, de fatigue et qu’ils bougeaient peu [12].

C’est une découverte intéressante, en ce qu’elle ouvre des possibilités de prise en charge plus ciblées pour prendre soin de l’état psychologique des patients.

Les recherches actuelles tendent justement à utiliser des techniques alternatives, conjuguées aux méthodes traditionnelles. On compte ainsi la musique, ou encore l’hypnose.

Les effets positifs de la musique

Depuis environ une décennie, les scientifiques ont mis en évidence le rôle de la musique dans la réhabilitation neurologique. Ils ont trouvé des résultats prometteurs dans les cas suivants [13] :

– Les AVC,

– La démence (Alzheimer, maladies cérébrovasculaires, notamment),

– l’epilepsie,

– la maladie de Parkinson,

– la sclérose en plaque.

Bien que le rôle joué par la musique reste flou, les scientifiques ont pu déterminer qu’elle avait un impact particulièrement positif sur la réhabilitation moteur dans le cadre de la maladie de Parkinson, ainsi que des conséquences d’un AVC.

Les applications mobiles, les livres numériques intégrant de la musique, ou encore l’émergence de la réalité virtuelle sont de futures voies d’exploration pour en faire les outils de demain de la réadaptation neurologique.

L’hypnose

Arrivée dans le champ médical moderne par la psychanalyse et l’engouement qu’elle provoquait, l’hypnose est aujourd’hui une piste dans la réadaptation neurologique.

En se reposant sur la suggestion comme aide aux moyens thérapeutiques classiques, l’hypnose joue aujourd’hui un rôle de plus en plus important pour les patients en souffrance.

Si pouvoir de la suggestion, ou de l’auto-suggestion, fait aujourd’hui l’objet d’étude pour être utilisées sans l’hypnose [14], l’hypnose fait toutefois de plus en plus d’émules.

Ainsi, au Royaume-Uni, un service spécialisé en réadaptation neurologique, a expérimenté l’hypnothérapie sur des patients durant 4 ans. Les résultats furent concluants avec une baisse significative des symptômes [15].

La plupart de ces patients ne développèrent plus de symptômes durant les six mois qui suivirent les sessions d’hypnose.

Ainsi, la réadaptation neurologique s’ouvre sur de nouvelles pistes thérapeutiques. Utilisées concomitamment avec les techniques classiques, développées depuis le milieu du XXème siècle, comme le concept Bobath, elles servent au mieux-être des patients.

La réadaptation neurologique est certes un long et difficile combat pour tous les patients, mais c’est également un incroyable apprentissage pour apprendre dans le dépassement de soi et de potentialités insoupçonnées.

Nous ne pouvons que tirer notre chapeau à tous ces patients qui luttent, qui endurent et qui doutent, mais qui finissent par réussir à se rétablir pleinement ou au moins en partie.

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[2] Pratique de la rééducation neurologique, Anne de Morand, 2ème édition, édition Elsevier Masson, Issy-les-Moulineaux, 2014, page de couverture.

[4] L’autre combat : vers une reconstruction humaine des militaires blessés, des sans-abris, des prisonniers, éditions EdB, Nouan-le-Fuzelier, mars 2013.

[1] https://medical-dictionary.thefreedictionary.com/neurological+rehabilitation

[13] Music-based interventions in neurological rehabilitation, Sihvonen et autres, Turku University, Helsinky, Finland,

Lien externe : https://helda.helsinki.fi/bitstream/handle/10138/311671/Sihvonen_et_al_2017_Lancet_Neurol.pdf?sequence=1

[5] Le concept Bobath.

Lien externe : https://www.crmh.fr/crmh/custom/module/cms/content/file/Fiches_methode/bobath(1).pdf

[6] https://physio-clinics.ch/soins-traitements-physiotherapie/physiotherapie-reeducation-neurologique/

[7] Rééducation neurologique.

Lien externe : https://www.primomedico.com/fr/specialite/reeducation-neurologique/

[3] Intérêt et coût de la réadaptation neurologique des patients cérébrolésés, Andreas Mühl et Philippe Vuadens, Revue médicale Suisse, 2011, numéro 293.

Lien externe : https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2011/revue-medicale-suisse-293/interet-et-cout-de-la-readaptation-neurologique-des-patients-cerebroleses

[8] Ibid., Intérêt et coût de la réadaptation neurologique des patients cérébrolésés.

Lien externe : https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2011/revue-medicale-suisse-293/interet-et-cout-de-la-readaptation-neurologique-des-patients-cerebroleses

[9] Ibid., Intérêt et coût de la réadaptation neurologique des patients cérébrolésés.

Lien externe : https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2011/revue-medicale-suisse-293/interet-et-cout-de-la-readaptation-neurologique-des-patients-cerebroleses

[10] Ibid., Intérêt et coût de la réadaptation neurologique des patients cérébrolésés.

Lien externe : https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2011/revue-medicale-suisse-293/interet-et-cout-de-la-readaptation-neurologique-des-patients-cerebroleses

[12] Ibid., Intérêt et coût de la réadaptation neurologique des patients cérébrolésés.

Lien externe : https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2011/revue-medicale-suisse-293/interet-et-cout-de-la-readaptation-neurologique-des-patients-cerebroleses

[11] Neuroéducation précoce au Centre hospitalier universitaire vaudois : du rêve à la réalité, Berney, Diserens, et autres, 2011, numéro 293.

Lien externe : https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2011/revue-medicale-suisse-293/neuroreeducation-precoce-au-centre-hospitalier-universitaire-vaudois-du-reve-a-la-realite

[14] Hypnosis as therapy for functional neurologic disorders, Deeley, National Library of Medicine, National Center for Biotechnology Information, 2016, doi 10.1016/B978-0-12-801772-2.00047-3.

Lien externe : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27719873/

[15] The use of hypnotherapy as treatment for functional stroke : A case series from a single certer in the UK, Sanyal, Raseta et autres, National Library of Medicine, National Center for Biotechnology Information, janvier 2022, doi 10.1177/1747493021995590.

Lien externe : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33527884/